Le design sprint est une méthodologie d’idéation accélérée misant sur la pluridisciplinarité des participants et la contrainte du temps. Généralement mené sur 5 cinq jours, au cours desquels les 5 étapes du design thinking sont mises en œuvre, le design sprint vise à explorer un maximum d’idées, ne retenir que la ou les meilleures, les prototyper puis les tester auprès d’utilisateurs cibles. Associant idéation, stratégie business et UX design, cette démarche a pour but de diminuer le risque avant le développement d’un produit ou d’un service, et donc avant d’investir dedans.
Créé, expérimenté et théorisé entre 2010 et 2016 par Jake Knapp, un ancien de Google Ventures, le design sprint emprunte également aux valeurs de la méthode agile, utilisée dans la Silicon Valley. Au début de sa carrière, Knapp observe que les brainstormings conventionnels, très utilisés pour imaginer des produits innovants, présentent des lacunes, que l’on observe également dans des études de psychologie des années 1960 : « le groupe peut avoir un effet inhibant sur les individus et leur créativité ». Il cherche alors des alternatives et de là naissent les premiers formats de design sprint.
À chaque jour son programme
Il est d’usage de mener un sprint sur une semaine complète, avec pour chacun des cinq jours une étape bien définie (chaque étape dépendant de la précédente).
– lundi – planter le décors, comprendre, définir les problèmes : la première journée consiste à comprendre les enjeux, les problématiques, les objectifs à atteindre. La présence d’un expert métier est d’ailleurs parfois requise afin que tous les participants au sprint bénéficient du même niveau de connaissance pour la suite du processus. On pourra mobiliser ici des clés de compréhension liées à la recherche utilisateur, aux parcours, aux personas, afin de bien comprendre de quelle cible parle-t-on.
– mardi – sketcher, diverger, ouvrir le champ des possibles : la deuxième journée incite ensuite à imaginer des solutions aux problèmes révélés. Pas de limite ici : tout est envisageable. Le but est de générer un maximum d’idées, de varier les perspectives, de penser différemment. Une fois toutes les idées couchées sur le papier, il conviendra ensuite de commencer à les affiner.
– mercredi – décider, prendre parti, arbitrer : la troisième journée est consacrée à se focaliser sur la ou les idées les plus pertinentes, avec le recul nécessaire suite à l’idéation de la veille. Le but sera donc de confronter les solutions les unes aux autres afin que les participants puissent voter et retenir les plus adéquates.
– jeudi – prototyper, construire, faire prendre forme : la quatrième journée vise à mettre sur pieds la ou les solutions retenues. Il s’agit donc ici de prendre soin de prototyper de manière la plus réaliste possible en vue des tests utilisateurs du lendemain. Réalisé essentiellement par les designers, avec le concours régulier des autres membres de l’équipe, le prototypage s’effectue sur un format défini par l’équipe. Des outils tels que Sketch ou Figma peuvent être utilisés.
– vendredi – tester, vérifier, trancher : cette cinquième et dernière journée est donc consacrée aux tests utilisateurs des prototypes, qui permettront de valider ou d’invalider la solution grâce à ces feedbacks, puis de prendre une décision sur la suite à donner. Le 5ème jour se compose donc essentiellement de user tests et de débriefs.
(Le déroulé peut cependant être adapté en fonction du besoin.)
Les ingrédients du succès
– Qui réunir pour mener à bien un design sprint ?
Généralement, une équipe de design sprint, se compose d’un groupe pluridisciplinaire de 4 à 7 personnes :
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- Le décideur : dans la plupart des cas un expert métier, il a pour mission de trancher lorsqu’il y a plusieurs voix discordantes dans le groupe.
- Le facilitateur : aussi appelé sprint master, il anime les différents ateliers, s’assure du respect des timings définis au préalable, synthétise les idées, garantie la pertinence des livrables.
- Le représentant de la vision produit : souvent issu de l’équipe marketing/produit, celui-ci rappelle les objectifs du produit ou du service en cours d’étude.
- Le représentant de la vision client : issu de l’équipe SAV par exemple.
- L’ingénieur ou le développeur : qui saura juger de la faisabilité technique de la solution envisagée.
- L’UX Researcher : en charge de conduire les tests utilisateurs.
- Le designer : aide à la conception et réalise le prototype.
(L’équipe peut être adaptée en fonction du besoin initial.)
– Quels sont les prérequis pour assurer le bon déroulement ?
Pour garantir son succès, un travail de préparation est nécessaire en amont du sprint.
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- Mobiliser l’équipe la plus pertinente, disponible, et disposée à se prêter pleinement au jeu
- Réunir des conditions logistiques idéales en préparant une salle adéquate, les supports d’atelier, le matériel nécessaire
- Recruter des testeurs réels pour garantir la pertinence de la session de user tests
- S’assurer que, chaque jour, tous les participants prennent conscience des enjeux de chacune des étapes et préparer la journée du lendemain pour aider à se projeter
– Et après ?
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- À la fin du dernier jour, suite aux tests utilisateurs, suffisamment de feedbacks auront été récoltés afin de décider de l’avenir du produit ou du service testé (execute, iterate or kill). Plus les retours seront positifs, plus il aura de chances de voir le jour concrètement.
À l’aune du sprint, il convient également de communiquer les résultats aux participants afin de maintenir le niveau d’engagement créé lors de cette semaine de travail.
Un design sprint pour tous les projets ?
Si le design sprint peut s’appliquer à de nombreux projets, il ne peut satisfaire tous les objectifs. Ainsi, il n’est pas forcément indiqué pour prototyper une application de A à Z, pour créer un nouveau parcours utilisateur complexe, ou pour designer dans le vague, sans avoir identifié au préalable un périmètre précis. Et des projets de trop petite envergure ne se prêtent pas non plus à cet exercice.
En revanche, la méthodologie est tout à fait pertinente pour explorer un nouveau concept dans le cadre d’un produit existant, par exemple. Il pourra aussi être indiqué pour imaginer et réaliser une nouvelle fonctionnalité d’application en cours de développement, pour optimiser un parcours utilisateur particulier, ou encore pour valider un design system.
La force du design sprint réside donc dans sa capacité à stimuler l’intelligence collective, favoriser l’émulation, récupérer rapidement des feedbacks en vue de décider de l’avenir d’un produit ou d’un service. Sa promesse est très intéressante et ambitieuse : une semaine pour prototyper une nouvelle expérience conçue et validée par des experts aux profils très différents réunis pendant 5 jours autour d’un objectif clairement défini et commun.
Initialement pensé pour travailler autour de problématiques digitales, le design sprint s’applique désormais à de nombreux secteurs, qu’il s’agisse d’étudier la faisabilité d’un projet, de participer à la conduite du changement, ou encore de déployer de nouveaux usages numériques.